Lexique du champ de l’éducation radicale.
Autrice: Irène Pereira
Action directe : Désigne dans le syndicalisme, l’action sans l’intermédiaire des représentants. Historiquement, quatre types d’action sont listés par le syndicalisme : la grève, le boycott, le sabotage et le label syndical. De nos jours, on peut distinguer plusieurs types d’action directe : a) l’action directe légale (ex : la grève), b) l’action directe illégale de désobéissance c) l’action directe illégale tournée contre les biens matériels (sabotage).
Autoformation radicale collective : Il s’agit de pratiques d’autoformation menées par des minorités actives le plus souvent directement concernées par une oppression. Mais ce n’est pas toujours le cas : dans l’antispécisme, par exemple, les personnes ne sont pas directement concernées. L’autoformation peut-être individuelle ou collective. Mais pour que l’autoformation radicale conduise à produire des minorités actives, elle doit passer par une phase collective.
Autoformation radicale individuelle : L’autoformation radicale individuelle porte par exemple sur les savoirs d’expérience de l’oppression ou encore les savoirs infrapolitiques que les opprimés acquièrent du fait de leur expérience d’oppression.
Autonomie : Le champ de l’éducation radicale est autonome. Il s’agit d’une forme d’éducation qui n’est pas instituée par l’État ou dépendant de l’argent privé.
Champ de l’éducation radicale : On appellera ainsi champ de l’éducation radicale, le champ qui comprend l’autoformation radicale – qu’elle soit individuelle ou collective -, l’éducation populaire radicale et la pédagogie publique radicale (Sandlin, 2011). Ce champ se caractérise par ses pratiques autonomes des pouvoirs publics et des pouvoirs économiques capitalistes. Il met en oeuvre des pratiques et des discours qui visent à conscientiser les rapports sociaux et à développer des luttes sociales par l’action directe.
Devenir-minoritaire : Comme l’écrivent Deleuze et Guattari, une minorité (groupe doté de moindre pouvoir) n’a pas d’emblée un devenir-minoritaire, elle a à entrer dans le devenir minoritaire : « la minorité, c’est le devenir de tout le monde, son devenir potentiel autant qu’il dévie du modèle ».
Education populaire hétéronome (ou institutionnalisée) : Il s’agit de formes d’éducation populaire dont la puissance d’action se trouve limitée par leur dépendance institutionnelle ou économique à l’égard des pouvoirs publics ou économiques.
Education populaire radicale (et autonome) : il constitue le travail de la culture (Maurel, 2001) que des minorités actives (ou agissantes) exercent pour conscientiser des minorités ou des majorités passives et favoriser leur participation à des actions directes afin de favoriser la transformation sociale. Dit autrement, l’éducation populaire radicale est le processus éducatif par lequel des personnes appartenant aux majorités passives deviennent des minorités agissantes.
Education populaire politique : L’éducation populaire politique s’est donnée pour sa part comme objectif de faire rentrer des éléments d’autoformation radicale et d’éducation populaire radicale dans un cadre institutionnalisé. Un ou une formatrice peut faire de l’éducation populaire politique quand elle travaille avec une institution et faire de l’éducation populaire radicale quand elle travaille avec des organisations de luttes sociales.
Éducation radicale : L’éducation radicale se caractérise par trois dimensions : a) l’autonomie b) la conscientisation c) l’activité (action directe).
Libération vs. Émancipation : L’émancipation renvoie à deux idées : a) soit l’émancipation du peuple par l’éducation promue par la classe bourgeoise (l’éducation populaire paternaliste) b) soit le modèle occidental, colonisateur et civilisateur du centre du système-monde relativement à la périphérie.
Dans la philosophie décoloniale latino-américaine, la libération est le processus par lequel les opprimés produise leur propre voie sans se caler sur le modèle d’émancipation issue des Lumières occidentales.
Pédagogie publique radicale : Désigne l’ensemble des modalités par lesquels les théories produites dans l’éducation radicale sont diffusées : discours, articles de presse, livres, médias alternatifs, blog ou réseaux sociaux…
Majoritaire : Cette notion ne recouvre pas avant tout une notion numérique, mais comme l’écrivent Deleuze et Guattari : « La majorité suppose un état de pouvoir et de domination, et non l’inverse. Elle suppose le mètre-étalon et non l’inverse. »
Marges : Les marges rejoignent la notion de Sud de B. de Sousa Santos. Les marges peuvent se situer à la périphérie du système-monde. Les marges peuvent constituer les groupes marginalisés du centre du système-monde.
Minorités : Il faut distinguer néanmoins trois sens du terme minorité : a) La minorité numérique capable d’influencer une majorité numérique si elle est active, b) La minorité, au sens sociologique, qui désigne un groupe doté de moindre pouvoir et socialement dominé c) Les minorités actives ou agissantes (que l’on trouve par exemple dans le syndicalisme révolutionnaire).
Recentrage : C’est le processus par lequel une théorie et une pratique issues des marges se retrouve reterritorialisé au centre, par exemple, institutionnalisé.
Savoirs minoritaires : Les savoirs minoritaires se sont les savoirs que les opprimés partagent dans l’éducation radicale : a) les savoirs d’expérience de l’oppression b) les savoirs de résistance infrapolitique c) les savoirs d’autonomie matérielle d) les savoirs militants d) les savoirs académiques critiques.
OpenEdition vous propose de citer ce billet de la manière suivante :
pedaradicale (17 avril 2025). Lexique du champ de l’éducation radicale. Les cahiers de pédagogies radicales. Consulté le 11 mai 2025 à l’adresse https://doi.org/10.58079/13ruy